L’ECRITURE COMME SUPPORT DU TRANSFERT

Que ce soit lors des périodes de décompensation psychotique ou d’accalmie, le passager par l’écriture est souvent une recherche de compréhension de ce qui fait souffrir ou envahir. Ainsi, quête de sens pour le patient, ces écrits peuvent devenir le centre de rencontre thérapeutiques, et plus particulièrement le support de la relation transférielle.

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La construction délirante s’accompagne, pour de nombreux sujets psychotiques, de l’écriture. La psychose pousse à la création. Le président Schreber ne se mit-il pas à écrire ses mémoires pendant sa décompensation psychotique ? En effet, précipité dans un tourment où le corps se délite, les voix se déchaînent, il hurle pour les faire taire. Isolé, il invente un stratagème, « un contre-pouvoir miraculeux pour contrôler les ombres et les voix : le dessiné* ». Il met sur papier les formes persécutrices. Ce qui lui apporte un relatif apaisement. Ainsi débute son travail d’écriture, son témoignage.

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Monsieur R. couvrait des cahiers d’écriture et disait à ce propos : « L’écrit fixe, coagule ce qui est fluide et subtil. Mais l’essentiel ne se laisse pas dans les mots. J’ai une frénésie d’écrire, car j’ai attendu longtemps cette possibilité. »

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Un statut particulier est réservé à la forme du cercle , 0, qu’il associe à divers registres qu’il formule ainsi : « le signe des différents états de conscience que j’ai traversés », « le Ô de l’adoration qui est aussi le Ô de la mort », « la roue bouddhique », « le paradis », « l’eucharistie », « la cellule sanguine », « le symbole de l’homme », « la question de l’être », « ma dualité » et lui-même : « Je suis le 0, je vais vers le un. » Une autre fois, il dira « le zéro », en ajoutant :  » Mon beau-père me disait que j’étais un nul, un zéro ». […]

Extrait de l’article L’écriture comme support de transfert, Chantal Emonet Moreau, in Le journal des psychologues n° 271, 2009

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